Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

dimanche 9 janvier 2022

Deucalion alm

 


 

Zeus comme beaucoup d’autres dieux par le monde, en eût un jour assez des créatures qu’il avait installées dans un lieu magnifique crée tout exprès pour leur bonheur. Des forêts profondes sous les grands arbres desquelles s’abritaient tout un monde de biches, de cerfs, de sangliers ; des plaines ondulant sous les épis dorés, des prairies fleuries butinées par les abeilles, des rivières poissonneuses, des lacs, des sources, des cascades qui dévalaient les montagnes. Et puis des elfes, des sylvains, des nymphes, des naïades….

Mais les humains, au lieu de vivre en paix dans ce monde féerique ne songeaient qu’à le piller, qu’à se jalouser, se battre, s’entretuer et certains même, osaient dévorer leurs semblables. Zeus souvent en compagnie d’autres dieux, les visitait, écoutait leurs doléances, tentait de les satisfaire mais en vain.

Alors exaspéré, le créateur de ce monde décida de le détruire. Par le feu ? par des secousses ? l’eau plutôt ! Peut-être avait-il inconsciemment l’idée de tout recommencer un jour et l’eau si elle détruit, une fois retirée fertilise le sol.

Quoi qu’il en soit, Zeus ordonna à Poséidon son frère de frapper de grands coups de son trident le fond des mers. Alors des vagues gigantesques envahirent les îles et les rivages engloutissant tout ce qui vivait là. Les fleuves et les rivières quittèrent leurs lits noyant les berges et les habitations.

Zeus dénoua le lien du sac où étaient enfermés les vents, il lâcha sa foudre et dans le fracas du tonnerre et des éclairs, les nuages se déchirèrent et la pluie se mit à tomber en rafales. L’eau monta, monta inexorablement submergeant les collines et jusqu’au plus hautes montagnes.  Pas un humain, pas un animal ne put survivre au cataclysme.

Sauf, un homme et une femme : Pyrrha et Deucalion. Deux êtres de bonté, de générosité qui ne méritaient pas de périr. Sans doute n’étaient-ils pas les seuls mais ils étaient cousins de Zeus et le père de Deucalion, Prométhée était ce Titan qui, entre autres bienfaits avait donné le feu aux hommes.

Avant la montée des eaux, Deucalion fut averti d’avoir à construire une nef en bois d’acacia, de lui donner la forme d’un croissant de lune et d’embarquer avec eux non seulement des vivres pour un long moment, mais aussi les semences de toutes les plantes et de tous les animaux.

Et c’est ainsi que tout le temps que dura le déluge, l’arche flotta à la surface des eaux.

Un jour enfin la pluie cessa et l’on vit apparaître le sommet des montagnes, puis une colombe vint se poser sur la nef qui s’échoua sur une hauteur. Plusieurs monts revendiquent cet atterrissage comme aussi plusieurs civilisations pensent que cette histoire leur appartient.

Quand le couple sortit à pas hésitants de leur embarcation, la vue de la boue, de la terre dévastée, sans un arbre, sans la moindre plante, sans un être vivant, toute cette étendue boueuse, le ciel bas et sans plus de lumière leur a serré le cœur. Qu’allaient-ils devenir dans cet univers hostile ? Ils avaient bien compris que la survie ne leur avait été accordée que dans le seul but de recréer de ce magma informe un univers purifié, délivré des crimes du monde qui avait péri. Oui, mais comment ? Ils étaient seuls, si seuls…

Pas tant que ça ! Les Dieux n’avaient pas disparu avec la création et c’est Hermès l’infatigable messager qui les envoya consulter Thémis. Seulement Thémis, comme tous les oracles leur délivra un conseil tout à fait incompréhensible. Pour refaire le monde leur conseilla-t-elle, ils devraient jeter par-dessus leur épaule les ossements de leur mère.

Quelle horreur ! quel sacrilège ! et puis, où trouver dans ce chaos les sépultures de leurs parents ?

Totalement abattus, Pyrrha et Deucalion s’en furent en ramassant des pierres et en le jetant dans leur dos. Pourquoi pas dans l’ordre des tâches impossibles à accomplir tenter de recréer des hommes avec des cailloux ?

Lequel des deux en se retournant, vit le premier que les pierres prenaient forme, s’allongeaient, s’assouplissaient, s’étiraient, bougeaient, les suivaient. Les pierres jetées par Pyrrha devenaient des femmes, les pierres jetées pas Deucalion devenaient des hommes. Une humanité belle et vigoureuse prête pour un nouveau départ.

Thémis n’avait pas menti : Pyrrha et Deucalion avaient tous deux pour ancêtre Gaïa, la Terre Mère.

 

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