L’étoile-
En ces temps très anciens, un jeune chasseur était amoureux d’une étoile.
Toutes les
nuits, il sortait de la grande hutte des célibataires pour contempler le
ciel où brillait son étoile. Il aurait tant voulu l’avoir près de lui, pour lui
seul. Mais comment capturer une étoile ?
Le garçon
avait pour seule fortune, un flacon transparent qu’il avait trouvé près de la
Meuvette. Il n’avait jamais su au juste à quoi pouvait servir cet objet mais il
l’aimait beaucoup et le trouvait très beau. Il l’aurait volontiers donné comme
demeure à son étoile.
Une nuit, il
a rêvé. Un rêve si intense qu’il s’est réveillé ; près de lui se
trouvait une jeune fille aux yeux brillants, si brillants qu’aucun doute
n’était permis : elle était son étoile. Ils se sont aimés tant et tant
qu’au matin, elle n’eut pas envie regagner le ciel et accepta d’habiter le
flacon.
Ils sont
restés longtemps heureux. Toute la journée, l’étoile était dans le flacon et il
pouvait la contempler à loisir ; toutes les nuits, elle le rejoignait sous
ses peaux de loup et de castor et ils s’aimaient, oh comme ils
s’aimaient !
Mais les
journées sont longues pour une étoile enfermée dans un flacon, même sous
l’apparence d’une minuscule jeune fille. Elle finit par s’ennuyer terriblement,
par regretter le ciel et sa famille d’étoiles.
Ses yeux, la
nuit, brillaient toujours mais le jeune homme y voyait à présent le
regard farouche d’un chat sauvage. Il en fut très malheureux.
Un soir, en
sortant du flacon, l’étoile lui fit ses adieux. Tout en larmes, il la vit
prendre une baguette, toucher un arbre qui se mit à grandir, à grandir jusqu’à
toucher le ciel. Il l’a suivie quand elle s’est élancée dans les branches.
Elle s’est retournée pour le lui interdire, mais il n’a rien voulu
entendre. Légère, elle montait bien plus vite que lui. Il la perdit de
vue mais n’en continua pas moins à grimper, grimper. Soudain, il entendit des
tambours de fête, un grand feu illuminait une clairière. Mais ceux qui
dansaient n’étaient pas des guerriers ni des chasseurs, mais de squelettes en
tenue de cérémonie. Terrifié, il manqua une branche, glissa,
glissa, dégringola et finit par s’écraser sur le sol dans une douleur
immense, son cœur et son corps brisés. Il se traîna jusqu’à la
hutte pour trouver refuge sous ses peaux de castor où il se blottit dans le
parfum de son amour perdu. Il resta couché là bien des jours et bien des
nuits.
Le chaman a
chanté tous ses chants, a essayé tous ses remèdes, il l’a baigné, fait
transpirer. Aucune purification n’a pu le rendre à la nature. Sa tête et son
cœur le faisaient souffrir chaque jour un peu plus.
Une nuit,
l’étoile visita son rêve. A son réveil, elle était encore là. Ni son cœur ni sa
tête n’étaient plus douloureux. Il l’a suivie jusqu’à l’arbre qui de
nouveau s’est mis à grandir, grandir jusqu’à toucher le ciel. Quand
elle est montée dans les branches, elle ne lui a pas défendu de le suivre. A sa
suite il a grimpé, grimpé. Il a entendu les tambours de fête et ceux qui
dansaient, dansaient pour leurs noces n’étaient plus des squelettes :
c’étaient des femmes et des guerriers faits de lumière.
1 commentaire:
Yves Montand a bien mis Pâris en bouteille !
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