Le roi qui les attendait avec impatience,
dès qu’il apprit leur retour, fit venir ses messagers. Non sans appréhension,
ils commencèrent à raconter leur quête et comment ils avaient trouvé l’enfant
qui spontanément était venu à eux.
« Me rapportez-vous son sang ?
- Non Sire, mais l’enfant est là, avec
nous.
-Qu’on l’exécute alors et vite !
-Sire, écoutez-nous d’abord. Il ne faut
pas tuer cet enfant ! il est l’être le plus prodigieux que nous ayons
jamais rencontré… Il sait l’avenir et le passé est ses conseils sont d’une
grande sagesse.
-Alors, cet enfant est le diable !
rugit Vortigern et j’ai besoin de son sang !
-Sire, cet enfant s’est confié à nous et
il sait pourquoi votre tour s’écroule et le moyen de la faire tenir. Nous lui
avons promis que vous accepteriez de
l’entendre.
- Et pourquoi le devrais-je ? Mes
mages m’ont donné la solution : elle est dans le sang de cet enfant.
-Il le sait, Sire… il sait tout sire, ce
que vous ont promis vos devins, il savait que nous le cherchions et pourquoi. Il
est venu à nous alors qu’il aurait pu se dissimuler…
-Bien, dit le Roi, faites venir cet
enfant ! Et si vous m’avez trompé, il mourra et vous avec lui !
On fit venir Merlin qui salua le roi,
considéra les messagers et se mit à rire.
Outré de cette insolence, Vortigern l’apostropha rudement :
« Qu’y a-t-il de si drôle ?
-Il y a que ces braves hommes risquent
leur vie pour sauver la mienne et qu’ils ont bien raison, car ils sont
désormais sous ma protection pour le reste de leur vie !
Le Roi irrité par l’outrecuidance de ce
gamin reprit :
« Qu’as-tu à me révéler ?
- Que vos clercs vous ont menti : ils
ne savent ni pourquoi votre tour s’écroule, ni le moyen de la faire
tenir !
-Alors selon toi, ils ne sont pas
devins ?
- Oh si ! mais ce qu’ils ont vu, c’est
que je serais la cause de leur perte et c’est pourquoi ils me voulaient mort.
Et pour leur donner raison, Sire, si je résoud l’énigme de la tour, vous devrez
leur faire subir le sort qu’ils me destinaient. Ainsi, ils auront dit la
vérité. Maintenant, Sire, faites-les venir et allons tus ensemble au pied de la
tour.
Arrivés là, les messagers à la demande de
Merlin questionnèrent les mages qui avouèrent ne pas savoir la raison de
l’effondrement de la tour mais persistèrent à affirmer qu’ils savaient le moyen
de la faire tenir et que ce moyen était le sang de cet enfant.
« Vous mentez encore, dit Merlin
sévèrement et vous ne pensez qu’à sauver votre peau ! Car oui, je suis cet
enfant sans père qui sait comment faire tenir la tour, et oui, je serai cause
de votre perte, car quand j’aurais résolu le problème, le roi vous fera
exécuter.
-Parle, maintenant, dit le Roi à Merlin
- Eh bien, Sire, votre tour ne tient pas
car vous l’avez fait élever au-dessus d’une grande nappe d’eau souterraine. Et
dans cette eau, dorment deux dragons aveugles. L’un est rouge , l’autre est
blanc. Ils sont énormes et ne peuvent se voir, mais ils se sentent et se
touchent. Ce qui les réveille ; alors ils se retournent et provoquent dans
l’eau des remous qui font trembler le sol. Quand votre tour, Sire, est sur le
point d’être achevée, si à ce moment- là, les dragons se retournent, votre tour
s’écroule.
- Quelle histoire invraisemblable
inventes-tu là dit Vortigern, incrédule.
- Vérifiez, Sire . Si j’ai menti, je
demande à être écartelé vif, mais si j’ai raison je demande grâce pour moi et
pour vos devins qui n’ont voulu que sauver leurs vie.
Vortigern accepta. Merlin fit venir des
chevaux, des charrettes, des pelles, des pioches et de nombreux ouvriers.
Les gens du pays, devant cette entreprise
insensée se demandaient si leur roi avait perdu la raison. Et l’on creusa,
creusa tant et tant, qu’on finit par atteindre la nappe d’eau. Le roi vint en
compagnie de Merlin, considéra la nappe d’eau et en présence de témoins
reconnut que l’enfant n’avait pas menti pour la nappe d’eau, mais on n’avait
pas encore vu les dragons !
« Il faut maintenant, dit Merlin,
creuser des fossés pour évacuer l’eau. Pendant ce temps, Sire, convoquez tous
vos sujets qui vont assister à un spectacle unique et terrifiant. Car dès que
les dragons seront à l’air libre, ils vont se sentir et s’entretuer. Et devant
tous vos pairs et vos conseillers, je vous ferai des révélations de grande
conséquence pour l’avenir du royaume. »
Vortigern fit comme Merlin avait dit.
Quand toute l’eau fut évacuée, on vit apparaître deux gros rochers.
« Les dragons , dit Merlin sont sous
les rochers.
-Puisque tu sais l’avenir, dit le roi,
dis-nous lequel des deux dragons sera le vainqueur.
- Je le sais, Sire, mais cette révélation
est d’une telle importance que je ne peux vous la faire qu’en privé et en
présence de vos plus fidèles conseillers.
Vortigern fit venir ses quatre plus
fidèles compagnons
. Merlin lui demanda s’il avait libéré ses
devins.
« Ils sont libres dit le roi !
Et Merlin dans le plus grand secret,
révéla comment la bataille allais se passer.
« Bien, dirent les conseillers, Nous
allons donc pouvoir constater l’étendue
des pouvoirs de cet enfant.
Et tous se rendirent au pied de la tour où
les ouvriers venaient de dégager le premier rocher. De la fosse on vit sortir,
un dragon blanc, énorme et d’une laideur effrayante. Il remuait lentement comme
mal réveillé mais il était si terrifiant que les gens se sauvaient en le
voyant.
Pendant ce temps, on avait dégagé l’autre
rocher et le dragon rouge sentant la présence de l’autre allait à sa rencontre
en grondant. Il était encore plus laid si possible que le premier et aussi
gros. Dès qu’ils se furent flairés et touchés, la bataille s’engagea,
effroyable, sauvage une lutte à mort qui dura tout le jour, toute la nuit et
encore une journée et une nuit jusqu’au lendemain midi.
Le dragon rouge était si brutal, si
féroce, que tout le monde pensait qu’il allait venir à bout du blanc, quand
soudain, le blanc se mit à cracher du feu , des flammes, un véritable brasier
et à l’étonnement général on vit s’écrouler et périr le dragon rouge, ce qui ne
manqua pas d’effrayer Vortigern qui voyait s’accomplir le début de la prophétie
que Merlin lui avait révélée en grand secret devant ses conseillers.
Voilà Sire, dit ce dernier, vous pouvez
maintenant élever une tour aussi haute que vous le souhaitez, plus jamais elle
ne s’écroulera.
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