PHEDRE -
Ah! douleur non encore éprouvée!
Tout ce que j'ai souffert, mes craintes, mes transports,
La fureur de mes feux, l'horreur de mes remords,
Et d'un cruel refus l'insupportable injure
N'étaient qu'un faible essai des tourments que j'endure.
Ils s'aiment! Par quels charmes ont-ils trompé mes yeux?
Comment se sont-ils vus? Depuis quand? En quels lieux?
Les a-t-on vu souvent se parler, se chercher?
Dans le fond des forêts allaient-ils se cacher?
Tu le savais! Pourquoi me laissais-tu séduire?
De leur furtive ardeur ne pouvais-tu m'instruire?
Hélas! ils se voyaient avec pleine licence;
Le ciel de leur soupirs approuvait l'innocence.
Ils suivaient sans remords leur penchant amoureux,
Tous les jours se levaient clairs et sereins pour eux.
Et moi, triste rebut de la nature entière,
Je me cachais au jour, je fuyais la lumière.
La mort est le seul dieu que j'osais implorer.
J'attendais le moment où j'allais expirer.
Me nourrissant de fiel, de larmes abreuvée,
Dans mon malheur encore de trop près observée,
Je n'osais dans mes pleurs me noyer à loisir:
Je goûtais en secret ce funeste plaisir
Et, sous un front serein déguisant mes alarmes,
Il fallait bien souvent me priver de mes larmes.
Quel fruit recevront-ils de ces vaines amours?
Ils ne se verront plus.
PHEDRE -
Ils s'aimeront toujours .
2 commentaires:
Quel plaisir dans ce petit matin d'hiver,
De retrouver le rythme des beaux alexandrins.
De circonstance ou d'actualité ?
Enregistrer un commentaire