La neige tomba toute la nuit et
c’est dans un décor de carte postale que se montra le jour suivant. Le soleil
brillait sur les arbres givrés ; tous avaient une envie enfantine de
laisser les traces de leurs pas sur la neige intacte des sentiers. Ils
montèrent au château réveiller Marlon qui pour leur laisser la place avait dû
non sans appréhension rentrer dormir dans son chantier en compagnie des
revenants qui, ayant décidé de fêter Noël entre eux, ne se manifestèrent pas.
Le parc redevenu forêt les
invitait à la promenade. Toufette, la chienne aimée d’Estournelle, sautait et
hurlait de joie , galopait en tous sens et finit par filer dans le
sous-bois derrière un chevreuil qui avait traversé l’allée. Estournelle inquiète,
s’égosillait à la rappeler. On n’entendit plus rien pendant quelques minutes,
puis des hurlements de détresse firent blêmir sa maîtresse.
-« Si elle crie, c’est
qu’elle est vivante ! » la rassura Ysolan impavide comme à l’ordinaire.
Furieuse, elle l’assassina du regard avant de courir vers les fourrés d’où
provenaient les abois désespérés de la fugitive.
Traverser un roncier enneigé,
vieux de plusieurs années ne fut pas une mince affaire. Mais rien n’arrête la
mère affolée d’un chien en danger, Griffée, trempée, Estournelle finit par
localiser sa chienne au fond d’une large fosse, profonde de quelques mètres et
dont les bords de pierre très droits rendaient le sauvetage difficile. Un épais
matelas de feuilles mortes avait amorti la chute et Toufette sautait comme un
cabri, grognait comme un porc, en essayant de sortir de là. « Une
échelle !glapissait Estournelle..
ou une corde… Ah mon Dieu ! Ah là là … du calme ma chérie… Elle va se
tuer… du calme… »
« Du calme toi-même !
intervint Ysolan, elle n’a rien ta chienne ! On va la sortir de là. Laisse-nous réfléchir. »
« Il faut sonder le fond pour
savoir s’il est solide et descendre, dit un des garçons qui était cascadeur, si
je peux descendre je vous passe la chienne et vous m’aiderez à remonter. »
« Il vaudrait mieux aller
chercher une corde dit Marlon, joignant le geste à la parole »
Mais le cascadeur, armé d’une
longue branche, avait évalué la solidité du fond et avait déjà sauté.
Toufette dans son affolement
avait gratté les feuilles mortes et la terre ; le garçon poussa un
cri angoissé.
« Elle est blessée, sanglota
Estournelle ! »
« Non, non, mais il y a une
main ! »
« Une main ? »
« Des os, je veux dire, un
squelette de main !!! oh, et même il y a tout le reste, dit le garçon qui
avait continué le travail de la chienne ; »
« Pour le coup, dit Marlon,
je vais chercher une échelle ! »
« Non, intervint Ysolan, ne
touchez à rien, il faut prévenir les gendarmes ! »
Trop tard ! On entendit un
cri perçant : une des filles à force de se pencher pour voir le squelette
était tombée dans la fosse. Toufette voyant de la compagnie s’était calmée et
sur le dos, pattes en l’air cherchait des caresses. Estournelle en revanche
sanglotait à s’étouffer suppliant qu’on lui rende sa chienne. L’identité du
squelette pour l’instant, elle n’en avait rien à faire.
Le reste de la troupe au
contraire s’agitait avec passion….Ysolan, redevenu pour la circonstance
capitaine de navire, calme et résolu, remit la troupe en ordre. Estournelle, sa
chienne sous le bras, fut envoyée à la maison avec mission de préparer du thé
pour tout le monde ; les filles devaient la suivre. Marlon, lui et les
« hommes » iraient à la gendarmerie.
1 commentaire:
Délicieuse atmosphère british où tous les drames s’apaisent avec une tasse de thé!
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