... ou comment s'y prendre avec les loups.
Les loups de nos montagnes, tout comme les ours font bien enrager les éleveurs de bétail. Disons éleveur et non berger car un vrai berger, accompagné de ses chiens ne craint ni les loups ni les ours. Il existe pourtant un moyen simple et efficace de neutraliser le fauve et il est raconté dans les Fioretti de Saint François d'Assise...
François, fils d'un riche marchand drapier, n'avait cure de succéder à son père. Il était épris de chevalerie, d'exploits guerriers et amoureux comme beaucoup de garçons de ce XIII° siècle où l'on contait dans toute l'Europe, les exploits du roi Arthur et de ses chevaliers. Pour satisfaire à son idéal, il partit pour la guerre et mena l'existence joyeuse et dissipée d'un jeune homme qui espérait se distinguer tant au combat que dans la vie. Mais voilà qu'une nuit, c'était à Spolète, il entendit en songe une voix lui reprochant sa conduite. Il rentre aussitôt à Assise, distribue ses bien aux pauvres et part sur les routes décidé à suivre à la lettre les Evangiles et prend pour héros, non plus Arthur mais le Christ, imite en tout sa conduite et choisit pour épouse la Pauvreté.
Commence alors pour François une vie d'errance; il va de ville en ville vêtu de bure et nu-pieds, il mendie sa nourriture, embrasse les lépreux, prêche la paix et la joie du coeur tout en livrant maints combats contre le diable et ses émissaires. Il respecte les pauvres, aime la nature et les animaux.
C'est dans l'année 1220 que de passage à Gubbio, il rencontre le Loup. C'était un animal féroce qui semait la terreur dans toute la contrée. Il décimait les troupeaux et n'épargnait pas les humains. On organisait battues sur battues sans jamais parvenir à le prendre tant l'animal était rusé. Les gens de Gubbio, découragés, virent arriver le Poverello et connaissant sa réputation se jetèrent à ses pieds en l'implorant de les aider.
François, pieds nus et armé de son seul crucifix, s'en fut dans les bois à la rencontre de la terrible bête qui, au détour d'un chemin ne manqua pas de se jeter sur lui, babines retroussées sur des crocs étincelants. François fit un signe de croix qui stoppa net le fauve. Alors le moine se mit à le prêcher en lui reprochant sa conduite. Le loup honteux se coucha aux pieds de François, oreilles et queue basses, museau entre les pattes.
"Relève-toi, lui dit François, je te pardonne! Tu es cruel parce que tu as faim. Si tu me jures de te réformer, de laisser en paix les hommes et leurs troupeaux, je te promets en retour que jamais plus tu ne souffriras de la faim ni de la solitude . " Le saint tendit la main; en signe de soumission le loup y posa sa patte. Le loup sur les talons, le Poverello retourna vers la ville.
Imaginez l'effroi des gens de Gubbio! La bête qui les terrorisait depuis des années était là, dans leurs rues. Fourches, bâtons et épées furent brandis, mais François leva la main:
"Paix, mes amis! Cet animal se repent et demande votre pardon. Il a mal agi parce qu'il avait faim. Nourrissez-le et il sera votre ami. Au lieu de vous nuire, il vous défendra et sera votre ami."
Les hommes ont oublié leur crainte et leur colère et accepté de prendre soin du loup. Ils tinrent promesse et pendant des années on a pu voir le loup circuler dans les rues de la ville, aimé de tous et caressé des enfants. Il n'effraya plus que les malfaiteurs qui de nuit tentaient de s'introduire dans la ville. Jamais plus il ne connut la faim ni le goût de la viande de mouton, sinon offerte par la population. Il mourut très âgé et pleuré par tous ceux qui avaient fini par l'aimer autant qu'ils l'avaient craint.
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