L’avènement d’Arthur avait été bien accueilli par le peuple. Les petites gens s’imaginaient toujours qu’un nouveau règne pouvait améliorer leur sort. Et la petite noblesse, honorée de savoir que le nouveau roi avait grandi chez un des leurs, l’avait d’emblée reconnu. Mais pour les grands barons, les anciens compagnons d’Uther, il n’en allait pas de même. Ils n’entendaient pas se laisser diriger par un adolescent, pas même encore armé chevalier et dont les origines n’en faisaient pas leur égal. Ils refusaient d’autant plus de lui prêter serment que chacun d’entre eux s’estimait capable de diriger le pays. Il est vrai qu’Arthur était jeune et devait encore faire ses preuves et c’était la raison pour laquelle Merlin qui savait tout, laissait planer le doute sur ses origines.
Or il advint qu’en Petite Bretagne, le roi Léodagan de Carmélide eût à lutter contre son voisin, le roi Claudas de la Terre Déserte allié des Germains qui envahissaient la Gaule. Léodagan était soutenu par les rois Bohort de Gaunes et Ban de Bénoïc . Cependant, leurs trois armées réunies ne venaient pas à bout de leurs ennemis. Léodagan qui avait prêté serment à Arthur lui demanda de l’aide. Le roi réunit une armée et suivi de Keu, son frère de lait et de Bedwyr son ami, il traversa la mer. Il portait avec lui Excalibur sa bonne épée et Merlin l’accompagnait.
La bataille fut sanglante ; les Germains étaient nombreux et féroces ; l’armée de Claudas, entraînée et dirigée par des soldats romains était redoutable. Celle d’Arthur semblait ne pas pouvoir résister à une telle force. Mais le jeune roi et ses compagnons se battaient comme des lions, Excalibur faisait des ravages, les tours de Magie de Merlin déconcertaient les adversaires. Léodagan, Ban et Bohort avaient repris courage, si bien qu’à la fin du jour, les Germains s’étaient repliés, Claudas était en fuite, Arthur et ses compagnons restaient maîtres du champ de bataille.
Depuis les tours du château, dames et damoiselles suivaient les combats, tremblant pour leurs champions et plus d’une admirait Arthur. L’une d’entre elles surtout : Guenièvre la fille du roi Léodagan. Et quand, après les cérémonies d’actions de grâce, les festins, les chants et les danses, Arthur quitta la Carmélide, il emportait avec lui le cœur de Guenièvre et lui-même aurait bien voulu l’embarquer sur son navire.
Car il devait rentrer et de toute urgence : les grands barons, les anciens compagnons d’Uther qui avaient refusé de s’unir sous la bannière d’Arthur Pendragon, en restant isolé chacun dans son domaine avaient laissé le champ libre aux envahisseurs. Les Pictes au nord, franchissaient le mur d’Hadrien et les Saxons par la mer, abordaient l’Angleterre de toutes parts.
Merlin s’en fut trouver Uryen, le plus ancien compagnon d’Uther, et lui remit en mémoire certains évènements qui s’étaient passés une quinzaine d’années auparavant et auxquels il avait pris part. Comment la reine Ygerne, avait une nuit accouché d’un garçon que lui, Uryen, avait confié à un étranger, aux portes de la forteresse d’Uther. Uryen se souvenait de tout ; il réunit les rois et barons et leur apprit comment Merlin avait confié cet enfant à Antor le vavasseur qui l’avait élevé. Cet enfant, le fils d’Uther et de la reine Ygerne était bien ce jeune Arthur qui avait réussi à s’emparer d’Excalibur fichée dans son enclume.
Alors Merlin prit la parole : « Seigneurs, les ennemis sont aux portes de vos forteresses ; ils sont nombreux, aucun de vous seul, ne peut rien contre eux. Unissez-vous sous la bannière d’Arthur Pendragon, le fils d’Uther que vous avez si bien servi ! »
Les rois, ducs et seigneurs ont écouté Merlin et c’est une armée grossie encore de celles des rois de Petite Bretagne , Léodagan, Ban et Bohort qui, sous la conduite d’Arthur conseillé par Merlin se mit en route pour affronter Pictes et Saxons dans la plaine que domine le Mont Badon.
Entraînés par Arthur qui faisait des merveilles à l’aide d’Excalibur, encouragés, par les conseils et la magie de Merlin, les seigneurs d’Angleterre et leurs armées ont fait un massacre des Saxons dont les morts se sont comptés par milliers et qui, décimés et dans le plus grand désordre, ont repris la mer, tandis que les Pictes regagnaient l’Ecosse.
La victoire du Mont Badon fit d’Arthur le roi légitime et incontesté de toute l’Angleterre. Mais il manquait encore quelque chose : il ne peut être de roi sans reine. Arthur devait se marier. Il ne manquait pas de fille ou sœur des seigneurs de la cour parmi lesquelles Arthur n’avait qu’à choisir. Mais une seule régnait sur son cœur : Guenièvre, la fille de Léodagan de Carmélide qu’il n’avait pas oubliée Léodagan, sensible à l’honneur que lui faisait Arthur, réunit les plus beaux présents de mariage. Bijoux, vaisselle d’or et d’argent, étoffes précieuses, meubles sculptés et parmi ces meubles le plus beau : une immense table ronde qui avait appartenu à Uther et qu’il n’était que juste de rendre à Arthur.
Les noces célébrées, Merlin vint trouver le roi et lui dit qu’il était temps de remettre à l’honneur une coutume instituée au temps d’Uther : celle de réunir les meilleurs chevaliers, les soutiens du royaume autour de cette table ronde et d’en rappeler les règles.
La table est ronde afin que nul de ceux qui siègent autour ne soit supérieur à un autre. Le roi lui-même devient autour de cette table l’égal de ses chevaliers. Et pour être certain qu’aucun lien de préférence ne s’établisse avant chaque réunion, le nom d’un participant se lit sur son siège et change à chaque séance. Seul un siège n’est jamais occupé ; c’est le siège périlleux. Il est réservé au meilleur chevalier du monde, celui qui seul sera digne de découvrir le Graal. Quiconque autre que lui tente d’occuper ce siège risque sa vie.
Car cette réunion des meilleurs chevaliers du royaume autour de cette table ronde a un but : la Quête, la quête des aventures dont l’aventure ultime est la quête du Graal. Ce Graal dont personne n’a jamais su, ni ne sait encore ce qu’il est vraiment, puisque ceux qui l’ont vu ou approché ne sont pas revenus.
Mais peu importe au fond ce qu’est le Graal. Le plus important, est de le chercher avec un cœur et une âme qu’il faut rendre digne de sa découverte.
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