Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

mercredi 17 février 2016

La jeune fille en deuil

Une jeune fille était inconsolable : elle avait perdu sa mère et ne cessait de regretter tantôt les bons moments passés avec elle, tantôt les disputes, tantôt les nombreuses fois où elle ne l’avait pas aidée.
Et elle pleurait, pleurait, pleurait…
Un jour que toute en larmes elle traversait la forêt, elle rencontra une vieille femme toute courbée sous un fagot trop lourd. Alors en souvenir de sa mère elle prit sur elle le fagot et accompagna la vieille jusqu’à sa cabane.
Et là- c’est classique me direz-vous- la cabane se changea en palais et la vieille devint fée.
Toujours classique, hein ! pour remercier la jeune fille la fée lui accorda un vœu….c’était une fée radin, en principe, c’est trois… mais bon !
La jeune fille n’avait qu’un désir : revoir sa mère au moins une fois pour lui demander pardon.  Aussitôt elle monta en Paradis où tout le monde vivait heureux, chantait, dansait, jouait, se régalait de toutes sortes de bonnes choses. Seule une vieille marchait courbée sous le poids de deux seaux débordant d’un liquide saumâtre. La jeune fille reconnût sa mère.
« Oh ! ma mère, tout le monde ici vit en paix, tout le monde se réjouit, pourquoi toi seule reste à la peine ? »  et elle se mit à pleurer…

« Cesse un peu ma fille,  dit la mère irritée ;  ce sont tes larmes que je porte dans ces seaux ! Et tant que tu pleureras je devrai les vider et il n’y aura ni paix ni joie pour moi ! »

Les Chouchous