Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

samedi 3 novembre 2012

Baba Yaga


Or donc, c’est une fois de plus un veuf qui se remarie et la belle- mère, pour faire son boulot comme il faut, déteste sa belle-fille, la jolie Natasha.
Elle la frappe, l’insulte, lui fait faire toutes les corvées et comme si ça ne suffisait pas, elle veut s’en débarrasser… définitivement.
Comme de juste , le brave homme part en voyage et la mégère se frotte les mains…elle va en profiter.
Elle affiche un sourire qui ne trompe personne et surtout pas Natasha à qui elle fait croire qu’elle va lui coudre une chemise. Ah, mais ! zut et flûte, c’est pas de chance, elle n’a plus ni fil ni aiguille ! Il faut donc que la gamine, si elle veut sa chemise, aille en chercher chez sa sœur.
Mais tout le monde sait bien que sa sœur, c’est la terrible Baba Yaga.
Natasha n’ose pas refuser, mais elle passe d’abord chez sa tante, la sœur de sa mère, pour lui demander conseil.
« Il faut y aller, dit la tante, mais prends avec toi  ce ruban, cette burette, ce pain et ce morceau de lard ; ils te seront utiles."
Un peu réconfortée mais pas tant que ça, la gamine se met en route. Elle marche, elle marche… longtemps… enfin, au fond des bois apparaît l’étrange maison, qui se déplace sur des pattes de poulet, de l’horrible sorcière. A l’intérieur, Baba Yaga, si maigre qu’on la surnomme Jambe d’Os est occupée à tisser.
Poliment, Natasha la salue et lui dit ce qui l’amène.
« C’est bien facile, dit Baba Yaga, je vais te chercher ça. En attendant, tisse à ma place. »
Natasha docile, s’installe devant le métier.
Mais Baba Yaga ne va chercher ni fil ni aiguille ; elle se rend dans la cuisine et dit à sa servante de faire chauffer de l’eau pour y mettre à bouillir sa nièce qu’elle va manger en pot au feu, et d’ailleurs, elle va au potager chercher des herbes et des légumes pour améliorer le bouillon. « Elle est bien grasse et j’ai faim, ricane-t-elle ! »
Avant de partir, elle lance à sa nièce : « Ne bouge pas, ma servante va s’occuper de toi ! » Et son rire est si terrible que Natasha est toute tremblante. Un pressentiment la pousse à détacher le foulard qu’elle porte sur ses cheveux et à l’offrir à la femme qui vient la chercher, et qui, ravie, dévoile à la jeune fille l’horrible projet de la sorcière. Natasha  veut se sauver, mais impossible, si Baba Yaga n’entend plus le bruit du métier à tisser,  elle va revenir….
Le chat qui dormait devant le poêle, ouvre un œil : « Et à moi, me donnerais-tu quelque chose ? » Natasha lui donne le morceau de lard. « Merci, dit le chat, sauve-toi, je vais tisser à ta place. » Mais prends ce peigne et ce torchon ; BabaYaga va te poursuivre et tu en auras besoin.
Elle prend le peigne et le torchon et se sauve en courant. Mais en traversant la cour, deux chiens grognent en lui montrant des crocs bien solides ; elle leur offre la miche de pain et les chiens la laissent passer. Mais c’est alors la porte qui refuse de s’ouvrir. Natasha sort sa burette et graisse la serrure ; les deux battants s’ouvrent tout grands. Puis un bouleau penché sur le chemin lui griffe le visage ; elle attache les branches autour du tronc avec le ruban.
Pendant ce temps, Baba Yaga revenait du potager et entrait dans la cuisine pour voir ce que devenait son pot-au-feu. Devant l’eau froide et le poêle éteint, elle secoue sa servante. Elle a faim !  Jamais sa nièce ne sera cuite à temps !
« Elle m’a donné son beau foulard, alors que vous ne me donnez jamais rien sauf des coups et des injures, alors je l’ai laissée tranquille ! »
Folle de rage, Baba Yaga va chercher sa nièce qu’elle entend tisser, mais horreur ! c’est le chat qui est au métier et il a fait le sien de métier, le chat, les fils sont tout emmêlés, ce qui est tissé est tout griffé.
« Que fais-tu là, malfaisant ! Et où est ma nièce ? »
« Elle est partie ! »
« Partie ? Comment ça partie ? pourquoi l’as-tu laissée filer ? »
« Parce que vous ne me donnez jamais rien, que des coups de balais. Elle, elle m’a donné un beau morceau de lard, alors je l’ai laissée partir ! »
Baba Yaga, se précipite dans la cour, donne des coups de pied aux chiens qui montrent les crocs et disent : « Nous l’avons laissée partir car elle nous a donné du pain et pas des coups de pied, elle ! »
La sorcière secoue la porte : «  Pourquoi t’es-tu ouverte ? »
« Parce qu’elle a graissé ma serrure que tu laissais rouiller ! »
« Et toi, bon à rien de bouleau, pourquoi l’as-tu laissée passer ? »
« Parce que tu ne sais que couper mes branches pour en faire des balais, alors qu’elle, les attachées avec ce joli ruban ! »
Alors Baba Yaga, complètement hors d’elle-même, monte dans son mortier et à grands coups de pilon se lance à la poursuite de Natasha. 
Pendant ce temps, la jeune fille l’oreille collée au sol, entend la sorcière qui se rapproche ; elle jette le torchon sur le sol qui, aussitôt se creuse en un fleuve large, profond, impétueux , plein de remous impréviibles.
Baba Yaga  trépigne et retourne chez elle ; elle revient avec deux bœufs et leur fait boire le fleuve jusqu’à la dernière goutte. Puis elle reprend sa course et va bientôt rattraper Natasha qui lance derrière elle le peigne qu’elle avait gardé. Alors une forêt s’élève, touffue, sombre, effrayante, encombrée de ronces. La sorcière cette fois tout à fait enragée, de ses fortes dents blanches et aiguisées comme des crocs, s’emploie à ronger les troncs, à mâcher la broussaille, mais en vain, plus elle mâche, plus elle ronge, plus le maquis repousse. Dépitée, il ne lui reste qu’à rentrer, affamée, dans sa maison aux pattes de poulet..
Pendant ce temps, le père de Natasha est rentré chez lui ; ne voyant pas sa fille, il demande où elle est.
« Elle est allée voir sa tante, dit la marâtre. »
Mais voici que Natasha arrive en courant encore tout essoufflée de la poursuite.
« D’où viens-tu dit le père ? »
« Ah, mon père ! ma mère m’a envoyée chercher du fil et une aiguille chez la Baba Yaga qui a voulu me faire cuire ! »
Et Natasha raconte son aventure.

Le père furieux prend son fusil et tue la mégère.
Natasha est vengée, mais... prenez garde! Baba Yaga court toujours....

2 commentaires:

manouche a dit…

...hélas elle est chez moi où elle me maintient en esclavage!

anne des ocreries a dit…

ah ! mais on va faire du bouillon de poule avec les pattes de sa maison, pis on va la bastonner jusqu'à ce qu'elle se tienne tranquille, cette vieille harpie !!!

Les Chouchous