Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

samedi 18 septembre 2010

C'est-y pas mieux comme ça???

 C'est -y pas mieux comme ça (1)

Il était une fois une mère-grand qui avait vendu sa mercerie. Il lui était resté un gros lot de pelotes de laine rouge, aussi tricotait-elle pour sa petite-fille, des chandails, des chaussettes, des cache-nez, des casquettes, des bérets, des bonnets. Tous les ans, pour son anniversaire, à chaque Noël, quand elle avait de bonnes notes et quelques fois pour rien, la petite recevait un nouveau modèle de bonnet, tricoté ou crocheté dans un nouveau point, mais invariablement rouge. Ses copines à l’école ricanaient et l’avaient surnommé « Le Petit Chaperon Rouge » et ça l’énervait. Une fois, elle avait demandé si pour changer, elle ne pourrait pas en avoir un bleu. « Non, avait répondu la grand-mère, tu aurais l’air d’un Schtroumpf ! ».
Et l’enfant qui savait qu’il est inutile d’argumenter quand un adulte s’imagine avoir raison, n’avait pas insisté.
Un jour, sa mère lui dit : « Il y a un moment qu’on n’a pas vu ta grand-mère ! Remarque, ça nous fait des vacances (c’était la mère de son mari), en revanche, je voudrais être certaine qu’elle n’est pas malade. Demain, c’est mercredi ; tu iras la voir ! »
« Aïe !se dit la gamine, je vais récolter un nouveau bonnet ! »
Le lendemain, la maman mit dans un panier un saucisson, du pâté et un petit pot de rillettes. La grand-mère habitait dans un endroit isolé de l’autre côté de la forêt ;
-« Ne traîne pas en route, dit la mère, et ne parle pas aux gens que tu ne connais pas ! »
« Pas de danger que je parle à quelqu’un pensait l’interpellée, il ne passe jamais personne sur cette… ptn… de route… »
Quant à traîner, elle avait bien l’intention de ne pas se presser. Et la voilà en route, son bonnet sur la tête et son panier au bras, sur le chemin de la forêt. Dès qu’elle fut hors de vue, elle commença son jeu favori : jouer avec son chien !
Elle aurait tant aimé avoir un chien, mais sa mère n’en voulait pas : « Un chien c’est sale, ça met des poils partout, impossible d’avoir un parquet ciré, ils laissent les traces de leurs pattes boueuses, ils font des trous dans le jardin pour enterrer leurs os, ils rongent les pieds des chaises, ils dévorent les chaussures et ils ont des puces ! Pas de chien ici ! »
Aussi, dès qu’elle était seule, elle sifflait son chien imaginaire, lui faisait faire le beau, lui lançait un bâton et justement, elle venait de trouver un très beau bâton, pas trop large, court, juste le bon bâton pour un chien. Et elle le lançait… mais un chien imaginaire ne rapporte pas ; alors elle lançait, ramassait, relançait ; elle finit par se lasser et jeta le beau bâton dans les fourrés.
Et c’est alors que le bâton bondit vers elle calé en travers de la gueule d’un… mais oui, d’un chien… un jeune…un chien gris aux étranges yeux jaunes ; des yeux qui auraient pu faire peur à une petite fille qui n’aurait pas eu tellement envie d’un chien . Tellement envie qu’elle se refusait tout d’abord à reconnaître l’animal dont elle avait pourtant vu le portrait dans tant et tant de livres, tant et tant de films. Car c’était bien un jeune loup qui venait de sortir des fourrés ; un jeune loup qui avait perdu sa meute, et qui s’ennuyait tout seul. Et la petite dut se rendre à l’évidence, ce n’était pas un chien qui se trouvait en face d’elle.
Elle avait beau avoir appris que les loups ne mangent plus les petites filles, qu’au demeurant, ils n’en ont jamais mangé vivantes, ( Les loups préfèrent de beaucoup l’agneau ou le chevreau, ce qui prouve que les contes ne racontent pas toujours n’importe quoi.), en voir un vrai comme ça brusquement, au milieu du chemin, rapportant un bâton qu’on avait lancé à un chien imaginaire, ça fait un peu peur.
Pourtant le loup, comme aurait pu le faire un chien ordinaire, d’un balancement de tête, lançait le bâton à ses pieds en remuant doucement la queue. La petite fille posa son panier ; le loup coucha ses pattes avant, la croupe en l’air, le fouet joyeux. Elle lança le bâton vers le ciel ; d’un bond, il le rattrapa au vol, le posa à ses pieds. La partie continua, le bâton volait en tous sens, la petite riait aux éclats et le loup gémissait de bonheur.

5 commentaires:

FRANKIE PAIN a dit…

et bien çà te va bien de te proménait chez tes amies du sud tu nous invente de belles versions du petit chaperon rouge et c'est du beua on s'y croirait
je t'embrasse

croukougnouche a dit…

J'adore cette version!!
Quelle belle scène que celle de ce jeu dans la forêt : et alors , comment ça se termine , avec la grand-mère ??

deef a dit…

Excellente version, bien modernisée ^^
Bien vu aussi le coup de "l'ami" imaginaire qui s'incarne.
La grand-mère ? Eh bien, contrairement à sa bru (et rien que pour la faire ch...), elle adore les chiens-loups. Et donc, elle le gardera chez elle, comme ça le petit chaperon reviendra la voir souvent et s'amusera d'autant avec son nouvel ami :p

P a dit…

Bien joué Deef... c'est presque ça!
P.

CLAIRE DESCAMPS a dit…

superbe version! drole et si bien ecrite!!! je continue!

Les Chouchous