Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

mercredi 17 février 2010

JEAN DE L'OURS (1)

Un jour d’hiver, une jeune fille s’en alla ramasser du bois mort dans la montagne. Un ours, embusqué derrière un buisson la guettait ; il se jeta sur elle et l’emporta dans la caverne où il vivait. Il la jeta sur un lit de feuilles mortes et ferma l’entrée au moyen d’un gros rocher.
Chaque jour l’ours lui rapportait de la nourriture et des présents, mais il n’oubliait jamais de bien  repousser le rocher de façon que sa prisonnière ne puisse s’échapper.
La jeune fille en prit son parti et, -il est des monstres plus déplaisants qu’un ours- accepta de devenir son épouse.
Un an passa ; elle mit au monde un enfant aussi velu que son père quelle nomma Jean. Dès qu’il fut en âge de parler, la mère raconta son aventure et sa tristesse de ne pouvoir retourner dans son village. L’enfant, pour faire plaisir à sa mère, tenta de déplacer le rocher mais il n’était pas encore assez costaud.
Jean grandit, et toujours il profitait des absences de l’ours pour essayer de déplacer le rocher ; arriva le jour où enfin, il put dégager un espace assez grand pour que sa mère et lui arrivent à se faufiler à l’extérieur. Enfin libres, ils coururent vers le village sans regarder en arrière tant était grande leur terreur d’être rattrapés.
Ils étaient en sécurité dans la maison familiale quand l’ours regagna sa caverne désertée. Désespéré, le fauve descendit au village et pendant plusieurs nuits, hurla, tenta d’ébranler la porte, mais en vain. Alors il disparut, et plus jamais on ne le revit.

Jean, que les villageois appelaient désormais Jean de l’Ours, grandissait et devenait de plus en plus fort, d’une force extraordinaire, d’une force d’ours. Il apprit le métier de forgeron et se fabriqua  une sorte de canne en fer qui pesait cinq quintaux. Son apprentissage terminé, la vie de village lui sembla monotone et il décida de partir découvrir le monde. Il embrassa sa mère, dit adieu à ses grands parents, et sa canne sur l’épaule,  légère comme une tige de roseau, il prit la route.

Sur son chemin il rencontra un homme qui entassait des pierres. De ses mains nues, il les arrachait de terre et les lançait comme de petits cailloux. Jean le salua et lui demanda ce qu’il faisait de ces pierres.
-Je construis un mur, dit l’homme, mais c’est bien ennuyeux !
-Viens avec moi, dit Jean, je pars découvrir le monde.
-Pourquoi pas,  dit l’homme ,et il suivit Jean.

Tous deux cheminaient d’un bon pas. Ils arrivèrent ainsi devant une rivière. Aucun pont ne la traversait ; un passeur était là qui portait les voyageurs sur son dos.
-Tu fais ça tout le temps ? demanda Jean. Ce doit être fatiguant ?
-Oh oui, soupira l’homme !
-Alors viens avec nous, forts comme nous sommes tous les trois, nous trouverons facilement de l’ouvrage.
Et les voilà partis, Jean, Passe-l'eau, et Lance roche. A la nuit tombante, ils se trouvaient devant un château aux fenêtre illuminées.
-Frappons, dit Jean et voyons si l’on accepte de nous loger pour la nuit.
Mais le château était désert, aucun bruit; ils appelèrent, cognèrent à la porte, pas un valet, pas une servante  ne répondit. Alors Jean tenta de pousser la porte, qui s’ouvrit sans difficulté. Ils entrèrent, prudemment traversèrent la cour, visitèrent les granges et les écuries, s’enhardirent à entrer dans le château sans rencontrer âme qui vive. Dans la grande salle, un feu flambait dans la cheminée. Une table était dressée , couverte de mets appétissants. Les trois voyageurs se mirent à table et dinèrent de bon appétit.
Réchauffés, nourris, ils décidèrent de s’installer là.
-Demain, dit Jean de l’Ours, j’irai à la chasse. L’un de vous deux viendra avec moi et l’autre préparera le repas.... à suivre


1 commentaire:

anne des ocreries a dit…

Oh, j'ai hâte d'avoir la suite !

Les Chouchous