Insensé celui qui somme le rêve de s'expliquer - Jean RAY - Malpertuis

vendredi 3 juillet 2009

Les 3 cheveux d'or du Diable (d'après Grimm)



Il y a de cela bien longtemps, une pauvre femme mit au monde un enfant né coiffé. La sage-femme qui savait des choses, prédit que cet enfant, quand il aurait quatorze ans, épouserait la fille du roi.
Peu de temps après, le roi vint à passer par ce village ; il voyageait incognito pour savoir ce qui se passait dans son royaume. Il ne manqua pas de se renseigner sur les derniers évènements locaux. On lui dit que justement, un garçon venait de naître coiffé et qu’il devait quand il aurait quatorze ans, épouser la fille du roi.
Ce roi était un mauvais homme et cette prédiction lui déplut beaucoup. Il alla trouver les parents et d’un ton paterne, leur expliqua que pauvres comme ils étaient, ils auraient du mal à élever cet enfant et qu’il valait bien mieux le lui confier : « Je l’éduquerai bien et plus tard, je lui trouverai un emploi à la cour. » Les parents ne voulaient pas se séparer de leur garçon, mais l’étranger leur offrit de l’or. Ils se dirent que puisque l’enfant était né coiffé, rien de mal ne pouvait lui arriver et ils finirent par consentir.
Le roi plaça l’enfant dans un coffre à l’arrière de sa selle et chevaucha ainsi jusqu’à une grande rivière, au plus profond de laquelle il jeta le coffre et l’enfant. « Et voilà, se dit-il, ma fille débarrassée d’un amoureux dont elle n’aurait eu que faire. » Cependant, le coffre ne coula pas, il était fait d’un bois parfaitement étanche et il flotta longtemps, longtemps et ne cessa de dériver que contre l’écluse d’un moulin situé à deux lieues de la capitale.
Un garçon meunier l’aperçut ; espérant y trouver un trésor, il l’attira avec un croc. Mais le trésor était un joli petit garçon, bien vivant et bien affamé. Il le porta au moulin. Le meunier et sa femme, qui se désolaient de n’avoir pas d’enfant, reçurent le petit comme un cadeau du ciel. Ils l’adoptèrent et l’élevèrent de leur mieux. L’enfant sauvé des eaux grandit en force et en sagesse.
Il était déjà grand quand un jour d’orage, le roi vint s’abriter au moulin ; il demanda au meunier si ce beau jeune homme était son fils. « Non sire, c’est un enfant que nous avons trouvé dans un coffre qui est venu s’échouer contre la roue de notre moulin. Il y a de cela quatorze ans. ».
Le roi demanda à voir le coffre et reconnut celui qu’il avait jeté à la rivière avec l’enfant né coiffé. Il prit un air aimable : « Meunier, je dois continuer ma route et la reine pourrait s’inquiéter ; ton garçon me rendrait-il le service de lui porter cette lettre ? Il aura deux pièces d’or pour sa peine. »
« A vos ordres, Sire », répondit le meunier et il dit au garçon de se préparer. Et le roi écrivit sa lettre ; il demandait à la reine de se saisir du messager, de le mettre à mort et de l’enterrer, de telle sorte qu’il ne le revoie pas à son retour.
Le garçon prit la lettre et se mit en route ; mais il se trompa de chemin et le nuit le surprit au milieu d’une épaisse forêt. Il finit par distinguer dans le lointain une faible lueur vers laquelle il se dirigea. Il arriva dans un maisonnette où il trouva une vieille femme assise près d’un feu. Surprise de voir un visiteur, elle lui demanda d’où il venait et ce qu’il voulait. « Je viens du moulin et je porte une lettre à la reine ; je me suis perdu ; m’accorderez-vous l’hospitalité pour cette nuit ? »
« Malheureux enfant ! Tu n’as pas de chance : cette maison est un repaire de brigands. Dieu seul sait ce qu’ils feront de toi s’ils te trouvent ici ! »
« Tant pis, dit le jeune homme, je suis trop fatigué pour continuer ma route et je n’ai pas peur des voleurs puisque je ne possède rien. »
Là-dessus, il se coucha sur un banc et s’endormit.

5 commentaires:

anne des ocreries a dit…

Bin déjà ça commence raide...qu'est-ce qui va lui arriver encore à ce pauvre gamin ? quels pervers ces Grimm, tout de même...mais au fait, heureusement, hein...

P a dit…

Ce n'est pas les Grimm qui sont pervers, c'est la vie. Ils n'ont inventé aucun conte; ils les ont collectés. Et les contes viennent de loin.
Dans celui-ci, l'enfant confié au fleuve, ça ne vous rappelle pas une autre histoire... bien plus connue?
PP

anne des ocreries a dit…

Si, on y pense d'emblée, bien sûr...archétypes...

P a dit…

C'est çà les contes!
J'ai du publier sur le blog toute une tartine que j'avais fait sur le sujet à un moment.
sous le titre de rendez-vous contes.
Quelle imagination!!!
PP

anne des ocreries a dit…

Oui, je me souviens, c'était très bien fait !

Les Chouchous